Justine Fletcher, directrice communication Heritage, The Coca-Cola Company

“Sans l’Europe, Coca‑Cola ne serait pas devenue la marque internationale que l’on connaît aujourd’hui”

Entretien avec Justine Fletcher, directrice communication Heritage, The Coca‑Cola Company.

Quand les boissons Coca‑Cola ont-elles fait leur entrée en Europe pour la première fois ?

Justine Fletcher : En 1900, Howard Candler, le fils aîné d’Asa Candler (fondateur de The Coca‑Cola Company en 1892), emmène un pichet de sirop avec lui pour ses vacances à Londres. La boisson est alors servie dans une fontaine à soda, et une commande de presque 20 litres supplémentaires est rapidement passée aux Etats-Unis. En 1895, Coca‑Cola s’est étendu bien au-delà de sa ville natale d’Atlanta pour être disponible dans tout le pays. En toute logique, le temps était alors venu de s’ouvrir à l’international. Tandis que les bouteilles de Coca‑Cola débarquaient en Europe les deux décennies suivantes, ce n’est qu’en 1919, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, que le premier accord local européen d’embouteillage est signé, en France.Justine Fletcher : En 1900, Howard Candler, le fils aîné d’Asa Candler (fondateur de The Coca‑Cola Company en 1892), emmène un pichet de sirop avec lui pour ses vacances à Londres. La boisson est alors servie dans une fontaine à soda, et une commande de presque 20 litres supplémentaires est rapidement passée aux Etats-Unis. En 1895, Coca‑Cola s’est étendu bien au-delà de sa ville natale d’Atlanta pour être disponible dans tout le pays. En toute logique, le temps était alors venu de s’ouvrir à l’international. Tandis que les bouteilles de Coca‑Cola débarquaient en Europe les deux décennies suivantes, ce n’est qu’en 1919, à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, que le premier accord local européen d’embouteillage est signé, en France.

 

"La direction a très vite pris conscience de l’importance de maintenir une expérience universelle de goût et de qualité”

 

Quand la première usine d’embouteillage en Europe a-t-elle ouvert ?

Justine Fletcher : La compagnie fait ses premiers pas à l’international lorsque la production locale est lancée au Canada, à Cuba, à Porto Rico et aux Philippines. A l’époque, Coca‑Cola est surtout apprécié et acheté par les expatriés américains. Hamilton Horsey, du département des Affaires Etrangères de Coca‑Cola, est alors invité en Europe et voyage au Royaume-Uni avant de rédiger un rapport estimant le temps et les investissements nécessaires à la création d’une marque pour Coca‑Cola. L’intérêt pour l’Europe perdure, et la première franchise d’embouteillage européenne est signée en France avec l’homme d’affaires américain R.A Linton qui, avec son associé George Delcroix, lance une première campagne et démarre les opérations d’embouteillage à Paris et à Bordeaux. L’embouteillage commence en 1919 en France, rapidement suivie par la Belgique et l’Italie.

Quelle a été l'importance du développement de la marque à l’international pour les premiers dirigeants ?

Justine Fletcher : La raison principale pour laquelle de nombreux aspects de l’entreprise Coca‑Cola - comme les uniformes, les couleurs et la recette - ont été standardisés, est la volonté de développer l’activité à l’international tout en gardant une expérience client cohérente d’un pays à l’autre. L’expansion de Coca‑Cola au-delà des côtes nord-américaines était très importante pour Robert Woodruff, nommé président de la compagnie en 1923. Il a alors ouvert en 1926 à New York ce qu’il a nommé “le département des affaires étrangères”, renommé plus tard en The Coca‑Cola Export Corporation (Société d’Exportation Coca‑Cola). Impatient de développer l’activité, le conseil d’administration donna sans attendre la permission à M. Woodruff de lancer l’activité partout dans le monde.

 

“La direction a très vite pris conscience de l’importance de maintenir une expérience universelle de goût et de qualité”

Comment les dirigeants se sont-ils assurés que Coca‑Cola conserve le même bon goût et la même qualité en Europe qu’aux Etats-Unis ?

Justine Fletcher : La direction a très vite pris conscience de l’importance de maintenir une expérience universelle de goût et de qualité. Des laboratoires itinérants sont alors mis en place afin que des techniciens puissent se déplacer d’usine d’embouteillage en usine d’embouteillage et s’assurer de la conformité de la fabrication des boissons et du respect de son goût unique. De plus, les dirigeants se déplaçaient également dans chaque nouvelle usine d’embouteillage pour superviser le lancement et attester du respect des normes rigoureuses. Si Robert W. Woodruff a ainsi pris soin de mettre en place un comité dédié à la normalisation des process, c’est dans l’espoir de faciliter le développement international de la marque.

Quels ont été les autres étapes importantes des premiers pas de Coca‑Cola ?

Justine Fletcher : A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, la compagnie comptait déjà 64 usines d’embouteillage dans le monde. De nombreux consommateurs n’avaient jamais goûté à Coca‑Cola auparavant. Le développement du portefeuille de boissons a été également une étape importante. La bouteille de 33 cl a été introduite en Amérique du Nord en 1955. Fanta fait son entrée sur le marché américain la même année (la boisson ayant été inventé à Naples en Italie), Sprite en 1961, TAB en 1963, puis vient le rachat de Minute Maid pour proposer une gamme de jus de fruits aux consommateurs. Toutes ces marques ont ensuite été déployées à l’international.

 

Quand Coca‑Cola a-t-il commencé à s'intéresser au sport et à la culture en Europe ?

Justine Fletcher : La relation qu’entretient Coca‑Cola avec le sport et la culture a débuté avec les Jeux Olympiques d’Amsterdam en 1928. Pour de nombreux européens, il s’agissait de leur première rencontre avec la marque, et la relation s’est développée au rythme de l’implantation des usines d’embouteillage pendant les décennies qui ont suivies. En tant qu’entreprise avec un fort ancrage local, Coca‑Cola met un point d’honneur à aller à la rencontre des communautés des territoires sur lesquels il est présent et organise pour elles des événements sportifs et culturels. Dans un premier temps, les contenus publicitaires étaient envoyés des Etats-Unis puis traduit dans la langue du pays de destination. Cette façon d’opérer a ainsi favorisé la diffusion d’un message cohérent, partout dans le monde.

Où peut-on, encore aujourd’hui, entrevoir les vestiges de cet héritage ?

Justine Fletcher : Les enseignes murales, les enseignes spectaculaires et les panneaux d’affichages sont tous des preuves de cet héritage emblématique - souvent encore visibles - et de la façon dont Coca‑Cola a utilisé l’affichage public pour aller à la rencontre de ses consommateurs dans sa volonté de s’exporter au-delà de l’Amérique du Nord. Bon nombre de ces enseignes murales originales (aujourd’hui appelées enseignes fantômes) sont encore visibles à mesure que les bâtiments sont restaurés et les centres-villes modernisés.

Quelle importance l’Europe tient-elle dans l’histoire globale de Coca‑Cola ?

Justine Fletcher : En quelques mots, sans son implantation en Europe, Coca‑Cola ne serait jamais devenue la marque internationale qu’elle est aujourd’hui. Les premiers entrepreneurs qui ont tenté l’aventure Coca‑Cola ont pris des risques, et ils ont fondé les bases sur lesquelles notre entreprise repose toujours, en 2019.